Un émetteur petites ondes 8 watts AM
L’émetteur expérimental TXOM-10
Par Daniel Maignan/F6HMT
Nos stations en modulation d’amplitude se sont tues…
L’objectif de cette description est de vous offrir les moyens de construire un émetteur afin de raviver notre bande de radiodiffusion des Petites Ondes.
Cet émetteur AM expérimental d’une puissance confortable, de construction classique, sera entièrement réalisé comme dans les années 50 avec des composants et pièces détachées provenant pour la grande majorité de récupération.
1) Description générale:
L’ensemble de l’appareil, dont les schémas sont représentés sur les figures 1 et 2, comprend un oscillateur à quartz (6J5) dont la fréquence est sélectionnée par le commutateur à 3 positions com 1. La grande amplitude du signal de sortie appliqué sur la grille de commande de l’amplificateur haute fréquence (6L6), conduit à un mode de fonctionnement en classe C Article de l chretien sur la classe c .
Le procédé de modulation est du type « plaque écran », dans lequel l’alimentation de l’anode et de la grille écran se retrouve en série avec le signal de modulation, de grandeur sensiblement équivalente, qui est délivré par l’amplificateur BF de puissance (6L6).
Le signal audio est traité dans un circuit équipé d’une double triode 12AX7 avant de rejoindre, une fois dosé par le potentiomètre P, la grille de commande du modulateur à 6L6.
La tension d’alimentation de l’oscillateur à quartz et du préamplificateur BF est stabilisée à 150 V par un régulateur au néon VR150.
L’alimentation générale (figure 2) est fournie par un transformateur dont la haute tension à vide est de l’ordre de 2 x 360 Veff, avec les deux basses tensions de 5 V et 6,3 Veff nécessaires au chauffage des tubes. Une valve biplaque 5V4 assure le redressement en double alternance de la tension qui est ensuite filtrée par une cellule passe-bas en pi.
Enfin un galvanomètre permet de mesurer, grâce à l’action d’un commutateur à 3 positions, la valeur de la haute tension, le débit de courant moyen du tube amplificateur HF (PA), ou bien le courant d’antenne dans le circuit secondaire.
Figure 1
Figure 2
2) Notes sur la modulation plaque et plaque écran :
Parmi les différents procédés qui peuvent être mis en jeu pour obtenir une onde porteuse modulée en amplitude, la modulation plaque est la plus efficace et donne un rendement constant, car la puissance fournie par l’amplificateur BF s’ajoute à la puissance de l’amplificateur HF fournissant l’onde porteuse, grâce au transformateur de modulation.
Le secondaire du transformateur est chargé par le tube d’émission et comme dans un amplificateur BF, la charge présentée par le primaire doit correspondre au mieux à l’impédance de sortie du tube. En utilisant deux tubes identiques, en l’occurrence des 6L6, les impédances sont du même ordre de grandeur, ce qui simplifie les choses car cela permet d’utiliser un transformateur de rapport unité.
Il est cependant difficile, en adoptant ce procédé, de moduler profondément la porteuse avec une penthode ou une tétrode, en raison de la résistance interne élevée et variable de ces tubes, du fait du peu d’influence de la tension anodique sur le courant anodique. C’est la raison pour laquelle la modulation est également appliquée à la grille écran, car c’est cette électrode qui accélère le flux électronique qui la traverse pour atteindre l’anode. En conservant son potentiel continu, on place un condensateur en parallèle sur la résistance d’écran et le potentiel de l’électrode va varier avec la modulation autour de son point de repos. Le niveau de signal de modulation doit être bien dosé car la caractéristique de la grille écran n’est pas très linéaire.
3) Les circuits HF:
L’oscillateur à quartz et 6J5 est un montage type Pierce, l’un des plus simples. La charge anodique L1 est une self moulée de 2,2 mH. Le condensateur C1 est un ajustable à diélectrique mica d’une capacité maximum de 250 pF qui est réglé une fois pour toutes pour un franc démarrage des oscillations. Le commutateur com 1 permet de choisir trois fréquences d’émission entre 1 MHz et 1,6 MHz (selon les quartz disponibles dans la bande).
Comme déjà mentionné, l’oscillateur est alimenté sous une tension de 150 V obtenue par un régulateur au néon VR150. Le rôle de C4 est simplement d’isoler les quartz de la tension continue et C3 en est le découplage.
Le PA à 6L6 : Comme indiqué précédemment, le tube 6L6 fonctionne en classe C. La tension d’attaque de la grille de commande est suffisante pour générer dans l’espace grille cathode un courant redressé qui engendre une tension très négative aux bornes de la résistance R3. Le courant anodique moyen développe également une tension sur la résistance de cathode R8 dont le rôle est d’éviter l’emballement du tube en cas de l’absence d’excitation ; le rendement de l’étage est de ce fait quelque peu altéré.
En définitive, la polarisation négative grille cathode est donc la somme de ces deux tensions dont la valeur varie entre –50 et – 60V, selon l’excitation.
L’anode est chargée par le circuit accordé L4/C10 qui agit comme un volant d’énergie mécanique et grâce auquel le signal pulsé retrouve son intégrité sinusoïdale. La sortie HF est prélevée par un enroulement secondaire L5 à basse impédance. Un petit transformateur L6/L7 situé dans le retour de masse de ce dernier, permet d’obtenir une information de tension proportionnelle au courant de sortie dans la charge de mesure ou l’antenne et qui s’avère utile pour le réglage et le contrôle du fonctionnement.
L’alimentation est délivrée à travers le secondaire du transformateur de modulation qui se trouve en série avec L4 dont le pied est découplé en HF avec un condensateur de capacité aussi faible que possible, tout en assurant le découplage HF sans toutefois altérer la modulation.
Le circuit de mesure permet de connaître la tension anodique, le courant anodique ou le courant antenne, selon la position de com 2.
4) Les circuits BF:
Le tube modulateur est précédé par un étage préamplificateur à double triode 12AX7 qui apporte une correction RIAA pour la lecture des disques à microsillon (voir la courbe de réponse en figure 3). Une entrée 0 dB est également disponible sur la grille de la deuxième triode pour les sources auxiliaires et autres tuners ou MP3. En sortie, le potentiomètre P permet de régler la modulation sur la grille du modulateur 6L6.
Figure 3
5) Réalisation :
Le châssis du montage est issu d’un poste de radio, choisi parmi une pile de plusieurs épaves pour ses dimensions et ses perçages existants, en particulier celui du transformateur d’alimentation (figure 4).
Un dépoussiérage et un lessivage ont été nécessaires puis un passage au Rustol® au recto et au verso. Ensuite le dessin imaginé pour le plan des perçages a été collé sur le dessus afin de pointer les trous (figure 5); ce procédé s’avère nettement plus pratique qu’un traçage direct sur la tôle. Une fois l’essentiel réalisé, quelques trous inutiles sont bouchés à l’Araldite®, d’autres sont agrandis, les bavures et la limaille sont ôtées, puis le dessus du châssis est peint avec une peinture mélangée avec du Rustol®.
Figure 4
Figure 5
6) Composants et pièces détachées :
- L’inductance L4 a une valeur de 42 µH. Elle comporte 48 spires espacées de fil 60/100 émaillé qui sont bobinées sur un mandrin en céramique de 36 mm de diamètre comportant un filetage. La hauteur du bobinage est de 60 mm. Avec un mandrin lisse, il faudra bobiner deux fils simultanément afin de respecter l’espace entre les spires.
- L5 qui comporte 7 spires est bobinée côté masse par dessus L4 avec du gros fil de câblage isolé à brins multiples.
- L7 est bobinée en fil de 20/100 sur un morceau de 25 mm de bâton ferrite de 10 mm de diamètre. Le bobinage est isolé avec du ruban autocollant puis 2 spires sont bobinées par dessus pour L6. Voir la figure 6.
- Le condensateur variable est un modèle récupéré sur une épave de récepteur à tubes qui comporte deux cages de 500 pF environ qui sont connectées ensemble. Choisir un exemplaire dont les stators sont isolés sur porcelaine, vérifier l’absence de court circuit, ôter les trimmers qui sont d’aucune utilité, puis le nettoyer au white-spirit à l’aide d’un pinceau.
- L’appareil de mesure est un modèle de 200 µA pleine échelle avec une résistance interne de 117 Ω. Les résistances ajustables dépendront évidemment de la sensibilité de l’appareil et les échelles de mesures pourront être réalisées à partir de courants et tension calibrés. Par exemple, pour la mesure de la tension anodique, pour avoir 600 V pleine échelle, soit un courant de 200 µA, il faudra une résistance R23 égale à 600/ 2 x 10-4 = 3 x 106 = 3 M Ω, la résistance interne de l’appareil étant négligeable.
- Pour le courant anodique du PA, toujours avec le même appareil, la chute de tension est mesurée aux bornes de la résistance R24 égale à 10 Ω. On détermine une pleine échelle de 1 V, soit un courant de 100 mA. Le courant de mesure de 200 µA est négligeable devant 100 mA et la résistance totale (R25 + Rinterne) doit être égale à 1/0,2 = 5 k Ω, donc R25 = 5 k Ω - 0,117 k Ω = 4,883 k Ω.
- Pour le courant d’antenne, un wattmètre est nécessaire pour mesurer la puissance P, ainsi qu’une charge R = 50 Ω 10W que l’on peut faire soi-même avec des résistances de carbone aggloméré. Pour le calcul du courant, utiliser la formule : Ieff = √P/R. Par exemple, avec 8 watts en sortie, le courant HF efficace est égal 0,4 A. Mesurer la tension disponible sur la diode et régler R4 pour tomber dans la fenêtre de l’appareil. Si l’on ne possède pas de wattmètre, celui-ci indiquera le réglage optimum pour le courant maximum.
- La figure 7 représente les trois échelles du microampèremètre qui a été utilisé.
- Un transformateur d’alimentation d’une quarantaine de watts fait office de transformateur de modulation… Le couplage audio a lieu entre les deux enroulements primaires de 110V qui doivent être totalement indépendants car, afin d’éviter la saturation du circuit magnétique, le câblage du modulateur et du PA est réalisé de telle sorte que les inductions magnétiques engendrées par les courants continus d’anode et d’écran des deux tubes s’annulent (revoir le schéma de la figure 1).
Figure 6
Figure 7
7) Le câblage et la disposition:
Voir les clichés des figures 8 et 9.
Le transformateur d’alimentation occupe la place qui lui était réservée sur le dessus du châssis, la self de filtrage et le transformateur de modulation sont installés au-dessous.
Côté HF, les supports de quartz sont montés sur une plaquette, les fils passent par un gros trous au dessous pour rejoindre le commutateur com 1 qui doit être proche. Le condensateur variable et l’inductance du PA L4/L5, ainsi que la mesure du courant L6/L7 sont fixés dessus. A ce niveau, les connexions qui doivent rejoindre le dessous du châssis sont réalisées sur des traversées en céramique (figure 10). Un support noval avec blindage est prévu pour le 12AX7.
Figure 8
Figure 9
Figure 10
Les connexions d’entrée BF sont réalisées en câble blindé. Idem pour les fils de chauffage. Le câblage se partage entre des barrettes à cosses et les supports des tubes. Les vis des cosses de masse sont bloquées par des rondelles éventail à dentures. Le potentiomètre de réglage de la modulation est déporté de la face avant afin de se trouver au plus près du câblage et de ce fait un prolongateur d’axe est nécessaire (figures 11, 12 et 13). Les figures 14 et 15 montrent les éléments de commande sur la face avant, avec l’appareil de mesure.
La sortie HF (BNC), les entrées BF et la prise secteur se trouvent à l’arrière.
Figure 11
Figure 12
Figure 13
Figure 14
Figure 15
8) Mesures sur l’émetteur :
Avec l’amplificateur de puissance fonctionnant en régime de porteuse non modulée sous une tension anodique de 300 V, parfaitement accordé et chargé sur 50 Ω, on mesure une tension HF crête à crête sur un oscilloscope égale à 56 volts, ce qui correspond à environ 8 watts HF. Cette puissance est confirmée par la mesure en dBm à travers un atténuateur de 30 dB sur un millivoltmètre HF URV R&S et le rendement anodique se situe aux alentours de 60 %.
Rappelons que la puissance en régime de modulation à 100 % est égale à quatre fois la puissance porteuse puisque la tension HF double, voir les oscillogrammes de la figure 16.
Figure 16
Pour un taux de modulation de 50%, la distorsion est égale à 1,2 % et reste inférieure à 8% pour M = 100 %, ce qui reste acceptable, sachant bien entendu que le taux moyen se situe autour de 50 % et que seules quelques pointes peuvent atteindre les 100 %, voir le trapèze de modulation sur la figure 17.
Figure 17
9) Réglages et utilisation :
- Connecter l’émetteur à la charge ou à l’antenne, sans modulation (P à 0).
- Mettre l’appareil de mesure sur la position « Va ».
- Mettre sous tension et attendre le chauffage.
- Contrôler la tension anodique.
- Mesurer rapidement les tensions et les comparer aux valeurs indicatives notées sur le schéma. Porter une attention particulière à la tension grille du 6L6 sur les 3 fréquences des quartz.
- Sur charge 50 Ω, mettre le commutateur sur « Ia » et tourner C10 lentement de façon à obtenir une chute brutale du courant (creux de plaque ).
- Positionner le commutateur sur « I ant » et tourner doucement C10 de façon à obtenir le courant maximum, ce réglage étant sensiblement différent du précédent.
- Sur antenne, avec l’adaptateur de la figure 19, faire le creux de plaque avec C10, régler ensuite le condensateur variable et l’inductance de façon à obtenir une résonance se traduisant par une pointe de courant antenne.
- Parfaire le réglage en retouchant C10, puis à nouveau le CV et rechercher la meilleure prise sur l’inductance avec une pince crocodile isolée.
- Refaire plusieurs fois toute l’opération.
- A titre indicatif, sur 1 MHz, avec l’antenne de 15 mètres, l’inductance fait 31 µH. Une self à roulette ou à prises est évidemment l’idéal pour ce genre d’essai (figure 18).
- Appliquer la modulation et régler le niveau audio en écoutant sur un poste de contrôle. Sur la position « Iant », l’aiguille de l’appareil doit bouger vigoureusement avec la modulation, et ce, dans le sens positif.
Figure 18
Une déviation négative de l’aiguille résulte d’une charge défectueuse de l’amplificateur HF, conséquence d’une forte désadaptation (modulation à l’envers), le courant d’antenne ne suit plus l’amplitude du signal.
Le fait de connecter quelques mètres de fil sur la charge, ce qui modifiera peu l’adaptation (nous sommes à 1MHz), permettra de couvrir sa maison et son jardin, voire la surface d’une brocante.
Avec une antenne d’une quinzaine de mètres qui se trouve à 3,5 mètres du sol, une bonne prise de terre (piquet et grillage enterré à faible profondeur) associées au circuit d’adaptation de la figure 19, on pourra obtenir une écoute confortable dans un rayon de quelques centaines de mètres. L’antenne peut se trouver à distance de l’amplificateur et reliée à celui-ci par du câble coaxial de 50 Ω. Le circuit d’adaptation sera installé au pied de l’antenne, avec le feeder relié à son extrémité et à la prise de terre.
Remarquons que ce circuit d’adaptation, dont le rôle principal est d’obtenir une résonance en offrant la meilleure charge possible à l’émetteur, est également un filtre passe-bas.
La réjection totale des harmoniques est égale ou supérieure à 40 dB.
Figure 19
Mais l’antenne présente toutefois un mauvais rendement car sa longueur effective reste très faible par rapport à la longueur d’onde.
A titre de comparaison, sur 100 MHz, avec une telle puissance et une antenne à plan de sol (ground plane), le rayon de couverture serait de plusieurs kilomètres !
Listes des composants:
10) Sécurité et législation :
Cet appareil met en jeu des tensions alternatives et continues très élevées. Rappelons qu’il est indispensable de prendre toutes les précautions habituelles relatives à la sécurité. En particulier, ne jamais intervenir dans le câblage sous tension.
Le but de cette description est d’enrichir, de développer par la pratique, les connaissances des lecteurs en techniques radioélectriques.
Sur une grande antenne, cet appareil ne pourra pas être utilisé durant une longue période, mais seulement à titre expérimental et sous l’entière responsabilité de son possesseur, car sa puissance dépasse la limite autorisée par la législation radioélectrique.
11) Conclusion :
C’est toujours pour moi une grande satisfaction, en espérant qu’il en sera de même pour vous, de construire un appareil qui fonctionne, de plus avec du matériel que l’on possédait à droite et à gauche et qu’il a suffit de rassembler.
Bonne réalisation !
Daniel/F6HMT
Documentation: Cours d'électronique de l'ECE
Article de Lucien Chrétien sur les classes d'amplification
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Date de dernière mise à jour : 21/06/2024
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